Hunger Incorporated
L’intitulé du séminaire de pratique artistique et curatoriale propose une exploration critique des conditionnements de surabondance et d'extremum que produit le régime économique néolibéral mondialisé, avec un intérêt particulier porté à la réalité du continent africain, avec comme fil conducteur la question des ressources naturelles. Hunger Incorporated fait référence de prime abord au droit fondamental à l'accès aux moyens de subsistance et à la menace de famine, mais aussi à la faim pour de matières premières à la base d’une croissance économique exponentielle, la faim comme insatiabilité intarissable, la faim comme ambition aveugle, la faim comme compensation d’un manque ou retard, la faim comme accumulation compulsive, la faim comme substitut d’utopie, et la faim comme l’une des manifestations allégoriques et sublimées de l’angoisse. La faim est une des forces motrices au cœur de la logique du capitalisme néolibéral, elle nourrit le conditionnement et le contrôle par le marché et contribue à la genèse d'un rapport angoissé au réel quotidien ainsi qu’à la menace de dystopie. Tandis que l’économie extractive – transformation, transport et commerce du pétrole, du charbon, des métaux et des minerais – a été le pilier du capitalisme des XXe et XXIe siècles, cette économie a été rendue remarquablement abstraite, invisible, évacuée des représentations et des récits : gisements et mines sont souvent strictement fermés et soumis à un rigoureux appareil policier, ainsi que les modes de transport et comptoirs de commerce de ces commodités. Le séminaire a sondé cette constellation de questions, de thématiques et de représentations à travers une série de conférences d’économistes, de commissaires d’exposition, d’artistes et d’historien-ne-s de l’art ; d’ateliers dirigés par des artistes et des réalisateurs/trices; de projections et de critiques d'expositions.
Le corps professoral pour la Session 1 était composé des réalisateurs Newton Aduaka, Ghassan Salhab et Carine Doumit, des artistes Ursula Biemann et Alfredo Jaar et de l'historienne de l'art Patricia Falguières.
Image : Sans titre, Christoph Terhechte, 2015.
Rasha Salti
Rasha Salti est commissaire d’exposition, spécialisée dans les arts plastiques et le cinéma expérimental, et auteure. Elle vit et travaille à Beyrouth (Liban). Elle a été co-commissaire de The Road to Damascus, avec Richard Peña, une rétrospective du cinéma syrien présentée internationalement (2006), et de Mapping Subjectivity: Experimentation in Arab Cinema from the 1960s until Now, avec Jytte Jensen (2010-2012), présentée au MoMA à New York. Elle était l’une des commissaires de la 10e Biennale de Sharjah. Elle a été co-commissaire, avec Kristine Khouri de Past Disquiet: Narratives and Ghosts from the Exhibition of International Art for Palestine (Beirut, 1978), au MACBA en 2015 et à la Haus der Kulturen der Welt, en 2016. Salti a dirigé la publication d’Insights into Syrian Cinema: Essays and Conversations with Filmmakers (2006, ArteEast et Rattapallax Press), de Beirut Bereft, The Architecture of the Forsaken and Map of the Derelict (Sharjah Art Foundation, 2010, en collaboration avec le photographe Ziad Antar) et de I Would Have Smiled: A Tribute to Myrtle Winter-Chaumeny, avec Issam Nassar, en 2010. En co-commissariat avec Koyo Kouoh, Salti travaille actuellement à Saving Bruce Lee : African and Arab Cinema in the Era of Soviet Cultural Diplomacy, un projet de recherche et d’expositions entamé il y a trois ans, qui donnera lieu à une publication.
© Laura Fiorio / Haus der Kulturen der Welt