Durant les quatre dernières décennies le hip-hop a servi de force radicale pour repositionner les cultures noires au centre de l'imaginaire populaire d'abord aux États Unis et ensuite à travers le monde. Le hip-hop est politique par son affirmation d'une identité qui va contre le courant dominant, politique par son usage de styles musicaux à la fois à l'avant-garde des développements technologiques et dérivés des sources non occidentales, ainsi que dans le contenu et la forme de ses paroles. Il s'agit d'une appropriation poétique de modes de vie alternatifs, prenant forme, selon DJ Afrika Bambaataa dans les quatre « éléments » de la culture hip-hop ; à savoir le rap, le DJing, la danse et le graffiti. À cela s'est rajouté un cinquième élément ; le savoir.
En décembre 2006, Nasir Jones, rappeur surdoué new-yorkais, choquait le monde du hip-hop en décrétant la mort de celui-ci : « Hip-hop is dead », le hip-hop est mort. Une sentence jugée sévère par beaucoup à l’époque et qui sonnait comme une tentative marketing désespérée pour vendre un album et relancer une carrière qui battait de l’aile. Cependant, le leitmotiv de Nas, au-delà de la controverse soulevée dans les médias a été le prétexte pour une réflexion profonde et sans complaisance sur l’état du hip-hop qui, sans doute, à cause d’une commercialisation à outrance, semblait avoir perdu son essence et cédé aux appels d’un capitalisme sauvage rompant ainsi le lien avec les laissés-pour-compte, ceux qui à travers le monde, lui avaient donné un corps, un langage, des espaces d’expression, une conscience raciale, sociale et politique. À cela, KRS-ONE opposa son désormais célèbre « I Am Hip-hop » (Je suis le Hip-hop) et « Hip-hop is alive » (Le hip-hop est en vie) arguant que le hip-hop est transmission mais aussi recréation spirituelle et que sa vie et sa mort ne sauraient seulement dépendre d’une image abâtardie donnée essentiellement par les médias et voulue par l’establishment.
Nous voilà donc plongés dans la (ré)définition de ce qu’est le hip-hop, ce qu’il fut ou sera demain. Est-ce le même hip-hop qui est passé des caves aux médias de masse, des rues de quartiers défavorisés aux scènes internationales pour le divertissement de millions de gens ? Pouvons-nous encore parler de culture hip-hop quand celle-ci, d’abord considérée comme une sous-culture, a aujourd’hui été imprégnée par les cultures populaires et voit son influence s’étendre de jour en jour à la mode, au théâtre, à la danse, à la musique, à la peinture, à la performance ou encore au cinéma; au point de s’y fondre et d’être devenu méconnaissable ? C’est à se demander si le hip-hop voulait changer le monde ou s’il réclamait simplement d’en faire partie en usant de subversion. Ou alors, dans notre quête de définition, devrions-nous nous arrêter simplement à l’esthétique du genre (MCing, DJing, Graffiti, Bboying, Beatboxing, Mode, etc.) et tenter d’en comprendre les liens avec l’histoire des noirs, peuple à l’origine du hip-hop ? Ces questionnements s’avèrent cependant périlleux vu le contexte dans lequel le hip-hop est né et nous emmèneront inévitablement vers des questions d’ordre social, racial, économique ou politique.